Comment concilier l’accueil de la biodiversité et le confort estival d’une piscine ? La piscine naturelle est toute choisie pour répondre à cette question. Elle est avant tout une mare avec les caractéristiques d’une mare classique, mais elle possède plusieurs caractéristiques supplémentaires qui vont permettre à son propriétaire de s’y baigner. Voyons ce qu’implique ce type d’installation, son fonctionnement et son réel intérêt pour la biodiversité. 

La zone végétalisée



Cette zone accueille l’arrivée d’eau et possède des berges en pentes douces, sous forme de paliers généralement. Un substrat adapté aux plantes recouvre cette zone, le mieux reste la terre d’origine du terrain si celle-ci garantit une certaine étanchéité. Si la mare est bâchée ou maçonnée, il convient d’ajouter de la terre en quantité suffisante pour permettre aux plantes de pousser, parfois alternée avec une couche de gravier, afin de favoriser le développement du système racinaire. Si cette installation marche bien, l’idéal serait de mettre un lit de caillou au-dessus de la terre. 

Il est important que différentes strates soient représentées sur cette zone, parmi elles, les plantes aquatiques qui vont oxygéner l’eau : Cératophylles, Callitriches, Myriophylles (attention, l’espèce Myriophylle du Brésil est une envahissante qui pose un problème à l’échelle nationale. Elle est encore vendue en magasin). Les plantes avec les pieds dans l’eau vont purifier l’eau de molécule plus ou moins chimique qui proviennent souvent des produits que l’on met sur notre peau : Roseau, Massette, Rubanier, Iris des marais… Et les plantes qui apprécient une forte humidité qui vont consommer les nutriments de l’eau et compléter l’action des autres plantes : Menthe aquatique, Joncs, Laîches, Salicaire… 

Pour en savoir plus sur ces végétaux, vous pouvez consulter la fiche “végétaliser son plan d’eau”.

Une dernière strate quasiment invisible, mais des plus importantes, est le biofilm. Cette fine couche de bactéries, algues, champignons, protozoaires, déchets organiques, etc. de couleur verte s’installe sur toutes les parois qu’elle trouve. L’oxygène est le facteur principal qui définira son efficacité. Le rôle du lit de caillou est essentiel, car il permet de garder des bulles d’air créées par la respiration des racines de la roselière. Ces mêmes racines vont aussi libérer des nutriments qui seront consommés par ces microbes. Ce simple aménagement va grandement aider à purifier l’eau du bassin. Le biofilm n’est peut-être pas des plus esthétiques, mais son rôle est essentiel et il est l’ennemi numéro 1 des algues filamenteuses. L’entretien de la piscine passe souvent par le récurage du biofilm à l’aide de brosses, environ tous les ans, mais on peut très bien la laisser indéfiniment sur les surfaces que l’on ne touche pas ou peu.  

Les grands principes


Caractéristiques générales

Tout comme une mare classique, elle ne dépasse pas 2 mètres de profondeur. Il est d’ailleurs souhaitable qu’elle ne dépasse pas 1m60 afin d’éviter le risque de noyade. Elle possède au moins 1⁄3 des berges en pentes douces, au mieux sous forme de pallier et sa forme doit être suffisamment complexe pour que les berges présentent différents angles d’exposition à la lumière. 

La piscine naturelle est régie par les mêmes lois qu’une simple mare, elle ne doit donc pas être sur une zone humide, ni être connectée à un cours d’eau.

Caractéristiques particulières

Ce qui va permettre la baignade et l’accueil optimal de la biodiversité, c’est la séparation de la mare en deux parties égales. La séparation se fait soit par un muret/filet/palissade, soit simplement par une grande différence de dénivelé. La partie la plus profonde est réservée à la baignade. La partie moins profonde est végétalisée et aménagée pour favoriser une bonne biodiversité, elle ne dépasse généralement pas 50 cm de profondeur. À noter que la partie végétalisée doit faire la même surface que la zone baignable au minimum afin d’assurer une bonne épuration de l’eau, elle peut tout à fait faire plus. De plus, on rencontre régulièrement différents aménagements, par exemple : deux zones végétalisées de ¼ et une zone baignable de 2/4 positionnée entre les deux. Ou bien encore, la zone baignable cerclée par la zone végétalisée. Tant que les proportions sont réspectées, cela ne pose pas de problème.

Ainsi, les deux parties étant en communication, la partie végétalisée remplit non seulement son rôle environnemental, mais purifie aussi l’eau continuellement, offrant une zone de baignade bien propre. L’eau est en circuit fermé entre les deux bassins. L’alimentation en eau peut se faire par la nappe, par simple ruissellement, par les gouttières (à condition que le toit ne soit pas en zinc, afin d’éviter de charrier des métaux lourds dans la mare) et l’arrivée d’eau est filtrée en amont de la mare pour éviter un trop gros apport de matière organique. Par conséquent, le fond de la mare est souvent très étanche : argile, bentonite, bâche EPDM, maçonnerie, etc. 

 

Le système filtrant électrique


L’eau doit toujours circuler entre les deux bassins, à l’aide d’une pompe. Autrement, les algues risquent de se développer dans la zone baignable. L’eau passe donc du bassin de baignade au bassin végétalisé par lequel elle traverse le substrat et le réseau racinaire. La dernière étape avant de repartir dans le bassin de baignade est un filtre de sable qui va récupérer toute la matière qui n’a pas été absorbée par les plantes. 

Si l’on fait le calcul, pour une zone baignable de 40 mètres carrés, ce qui serait un minimum si l’on veut nager, la surface totale serait de 80 mètres carrés. Cela devient très vite à une surface conséquente, pour peu que le terrain ne soit pas immense, toute sa surface va être utilisée par la mare piscine. D’autant plus que si l’on dépasse 100 mètres carrés de surface baignable, il est conseillé de créer le double de zone végétalisée pour assurer une filtration suffisante. Dans le cas où ce n’est pas possible, une autre solution, souvent plus onéreuse, peut être envisagée. En complément de la zone végétalisée, des techniques de filtration mécanique peuvent être installées. Pour cela, plusieurs alternatives existent :

  • Il est possible d'installer différents appareils dans l’eau, comme des skimmers à la surface de l’eau, des aspirations profondes qui débouchent vers des machines de filtrations mécaniques, une cascade débouchant sur la zone végétalisée, etc. 
  • Une autre solution consiste à faire passer l’eau dans plusieurs cuves montées en série, chargés chacune d'une fonction particulière : du captage des matières grossières à la dégradation des polluants les plus fins. 
  • Enfin, une dernière technique : la colonne de décantation et de vidange absorbe les déchets organiques lourds, qui se déposent dans le fond, le reste de l’eau est filtré par les plantes. 

Ces exemples ne sont pas exhaustifs, il existe beaucoup de techniques différentes pour filtrer l’eau. 

À noter qu’en hiver, l’eau peut rester stagnante, car l’activité microbienne est généralement très faible.

La zone baignable



Cette zone n’a pas autant de contraintes que la précédente. Elle a souvent peu de végétaux qui y poussent, parfois aucun car le fond a été maçonné. Les berges sont souvent un peu plus raides, de ce fait, les berges sont parfois équipées d’un ponton en bois ou bien d’une descente en marche avec une rampe. Cela permet de protéger les berges qui peuvent s'abîmer, car c’est une zone de passage ou à cause du battement de l’eau au fur et à mesure des saisons. Idéalement, le bois utilisé est d’une essence imputrescible, comme le Chêne, l’Aulne ou le Robinier. Il vaut mieux éviter le bois exotique comme le teck. 

Les 20 mètres autour de la piscine naturelle



La piscine naturelle bénéficie d’une exposition au soleil importante, mais pas totale. L’ombre est apportée par un bâtiment ou des arbres aux abords de la mare. Ceux-ci doivent conserver une certaine distance avec elle. Un bâtiment trop près de la mare ne serait pas réglementaire et un arbre risquerait de perdre ses feuilles dans la mare et apporterait trop de matières à chaque automne. Afin d’éviter une prolifération d’algues ou de bactéries, un minimum de 30% d’ombre portée est conseillé. Ainsi, on conserve une exposition suffisante pour la végétation filtrante. 

Accueil de la biodiversité



L’épuration de l’eau de la mare se fait beaucoup par les végétaux, mais aussi par les animaux qui y vivent. Les mollusques consomment une grande partie des déchets, ainsi que les insectes d’eau herbivores. Leur présence amènera leur prédateur naturel et une chaîne trophique va se créer dans la mare. Certaines rares espèces carnivores peuvent mordre, sans danger malgré la gêne, c’est pour cette raison que les deux zones sont parfois séparées d’un filet. À noter que les animaux de la mare vont peu s'aventurer dans la zone baignable car la nourriture et les abris sont quasiment inexistants. 

Pour parfaire cet équilibre trophique, quelques petits aménagements sont régulièrement installés dans la mare : bois mort, roches et graviers, souches mortes, etc. Et autour de la mare : des nichoirs à oiseaux et chauve-souris, des bacs à boues pour les hirondelles, des hôtels à insectes, etc. Tout comme une mare classique, conserver une zone non tondue et un endroit où sont entreposés des branchages, du bois mort et des résidus végétaux est un bonus considérable pour la biodiversité.

Les petits mammifères, les oiseaux et les reptiles peuvent se noyer dans la piscine, comme pour une piscine classique. Une ou plusieurs rampes en pente douce qui descendent dans la mare progressivement peuvent leur sauver la vie.

Limites


La mare est un milieu de transition entre terre et eau, et qui est donc fragile. La mare piscine l’est d’autant plus et observer son évolution à chaque saison est primordial. En cas de doute, il vaut mieux ne pas se baigner. 

Avant que la mare devienne baignable, il faut attendre un certain temps, pendant lequel des algues peuvent s’y développer. Si elles persistent, il est possible que le filtrage de l’eau ne soit pas suffisant ou que le mouvement de l’eau soit trop faible et qu’elle manque d'oxygène. De plus, après l’hiver, il est fréquent que les algues reprennent leur place dans l’eau, du moins jusqu’à ce que le bassin végétalisé soit de nouveau bien développé. Si les algues persistent après plusieurs mois, la mare est sûrement victime d’un déséquilibre. 

Si la mare piscine présente beaucoup d'avantages, son coût de construction est souvent conséquent, notamment, car elle doit avoir une grande surface. Si une pompe ou des aérateurs sont installés, le coût d’électricité est à ajouter. De plus, si l’écologie de la mare est perturbée, il sera peut-être difficile, voire impossible de se baigner. Il n'est pas conseillé de chauffer l’eau, au risque de perturber la faune et la flore. Tous les terrains ne sont pas adaptés à la construction de ce type de mare, de par sa taille et son alimentation en eau.

Dans le cas où le propriétaire de la piscine naturelle possède un chien ou encore des enfants en bas âge, il peut être préférable de clôturer la mare pour éviter tout risque. Notamment si le chien est blessé, il vaut mieux éviter de le laisser se baigner. Dans tous les cas, une arrivée d’eau potable près de la mare sera utile pour le rincer après chaque baignade. Sa peau est à surveiller, si des plaques se développent, la consultation d'un vétérinaire sera nécessaire. 

Pour l’homme, si quelqu’un se baigne avec une blessure, il faudra veiller à désinfecter aussitôt après. 

Pour ces questions de sécurité, n’hésitez pas à consulter la fiche “sécurisation d’une mare de jardin”.

(Source image : terreo-assainissement.fr)

Entretien



La mare baignable atteint un bon équilibre écologique après six mois minimum et jusqu'à deux ans. Après ces deux ans, elle nécessitera encore de l'entretien. Tout comme une mare classique, elle demandera une fauche des berges en automne s’il y en a beaucoup, une fauche des roselières tous les deux ans environ, etc. Grossièrement, surveiller régulièrement sa mare afin d’observer son évolution est la meilleure façon de savoir quel entretien sera nécessaire. En complément, une analyse physico-chimique en laboratoire serait préférable pour vérifier l’absence de pathogène ou de cyanobactérie.