Masse visqueuse à l’odeur douteuse, la vase tapisse le fond de la mare et ne fait que s’épaissir d’année en année. Doit-on lui faire la guerre ou bien doit-on la chouchouter ? Tout dépend de la mare concernée et de l’origine de cette vase. 

Les outils



Pour une petite mare, le mieux est d’attendre qu’elle soit à sec, généralement durant l’automne, et la curer à la main, avec des bêches ou bien des pelles. Si la mare ne s’assèche pas, il est possible d’utiliser une baguernette, sorte d’épuisette qui racle le fond. Le mieux est de le faire de la berge, mais c’est aussi possible depuis une barque.

Une mare plus grande va demander un curage plus mécanique, à l’aide de pelle hydraulique, araignée ou encore à godet. Ce type de machine est de taille conséquente et s’enfonce facilement dans la vase. Le mieux est que la machine soit équipée de chenilles ou de roues adaptées à ce type de milieu. Des entreprises de terrassement ont souvent ce qu’il faut. Certains agriculteurs peuvent aussi être équipés. Il est souvent possible de trouver un arrangement avec un agriculteur, s’il est intéressé pour récupérer les boues de la mare en guise d’épandage sur ses cultures.

 

La vase, qu’est-ce-que c’est exactement ?


Tout ce qui tombe inerte dans la mare sédimente inévitablement vers le fond. Avec le temps, les décomposeurs jouent leur rôle et on ne discerne plus rien qu’une couche de matière organique décomposée. Chaque année, ce même processus se répète, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de surface en eau et que la vase ait rempli toute la mare. Ce procédé est plus ou moins long, il dépend de la quantité de matière sédimentant dans la mare, de la taille de la mare, son environnement, l’activité microbienne qui y vit, etc. Cela peut prendre des centaines d’années comme une petite dizaine d’années. 

La vase est essentielle à l’écosystème de la mare. Elle est la nourriture, l'abri, le lieu d’hibernation, le lieu de reproduction, la cachette d’une multitude d’être vivant, animal ou végétal, du plus petit microbe au plus gros poisson, tout le monde en profite. D’ailleurs, à la création d’une mare, il ne faut pas plus d’un an pour qu’une première couche de vase se forme. 

Pourquoi la vase pue ?

Dans une petite mare, la vase pue rarement. Quand une odeur se dégage de la vase, c’est que la matière organique a été décomposée dans un milieu sans oxygène, par exemple très profondément dans un lac, dans un étang ou dans le sol. Dans ce type de milieu, on retrouve des bactéries qui vont dégrader la matière en libérant du soufre, composé qui sent l'œuf pourri. Une mare a souvent suffisamment d’oxygène pour que d'autres bactéries se chargent de la décomposition de la matière et ne dégage pas de soufre.

Méthode


 

Le curage d’une mare a lieu entre le début de l’automne et le début de l’hiver. Pour une petite mare, ce n’est pas bien sorcier, attendre qu’elle soit à sec ou avec un petit niveau d’eau et la curer à l’aide d’outils. Pour une plus grande mare, cela peut vite couter cher et devenir compliqué, pour peu qu’il y ait beaucoup d’arbres et que le sol soit mou. Pour faciliter le curage, il est possible de l’étaler sur plusieurs années. Par exemple, durant trois ans, chaque automne, ? de la mare est curée. Cela peut faciliter le processus.

Les mares bâchées sont les plus difficiles à curer, car il est facile de percer la bâche. Au mieux, une mare bâchée n’est pas curée du tout, cela sous-entend notamment qu’il y a peu d'arbres autour et pas de poisson ou canard y vivant. 

Dans tous les cas, il est nécessaire de laisser 10 bons centimètres de vase partout. La vase a un rôle essentiel pour la biodiversité, en l’enlevant totalement, c’est comme si la mare était remise à zéro. De plus, la vase protège la couche imperméable, que ce soit de l’argile ou une bâche. En cas de sécheresse, elle se mettra au-dessus d’éventuelles fissures pour conserver l’étanchéité de la mare. 

 

 

Les boues


 

Comme dit précédemment, les boues peuvent être utilisées comme engrais ou compostées. Toutes les boues ne peuvent pas être utilisées de cette façon, il faut s’assurer qu’elles ne contiennent pas de polluants. Une analyse en laboratoire peut répondre à cette question. 

Les boues peuvent aussi être récupérées par l’entreprise ayant effectué le curage. 

Enfin, les boues peuvent aussi être stockées indéfiniment sur un terrain, à condition qu’elles ne soient pas polluées et que le terrain ne soit pas une zone humide. Ce dernier point peut être diagnostiqué par l’ADREE, la DDT ou encore l'agence de l’eau. 

Attention, les boues de curage sont très riches et peuvent contenir de nombreuses graines en dormance qui attendent le bon moment pour germer. En les sortant de l’eau et en les laissant à la lumière du jour, de nombreuses plantes vont pousser, notamment des orties, des ronces et parfois des arbres, comme du saule. Cette raison peut d’ailleurs rebuter les agriculteurs à utiliser les boues de curage, au risque de diminuer le rendement de leur culture si d’autres végétaux prennent la place de leur culture.

 

 

Comment procéder ?


Quand ?

Le curage est souvent vu comme la solution à tous les problèmes que rencontre une mare. Pourtant, cette technique est assez traumatisante pour le milieu et n’est efficace que dans certains cas. Dans la pire des situations, elle peut mener à la disparition de la mare. 

Une mare de petite taille, encerclée d'arbres et ombragée, alimentée par le ruissellement, régulièrement visitée par des canards ou hébergeant des poissons, nécessite un curage régulier, tous les 5 ans environ. Une grande mare, bien ensoleillée, alimentée par la nappe, sans canard ni poisson, ne nécessitera pas de curage avant plusieurs dizaines d'années. Tout est une question d’environnement, le nombre d'années est ici une estimation vague et peut aller au-delà.

 

S’il y a beaucoup de vase, il faut curer. Le curage peut aussi être nécessaire dans une autre situation : l’envahissement par des végétaux. En effet, le curage peut faire partie des méthodes de lutte contre des Espèces Exotiques Envahissantes (EEE) ou contre des espèces locales devenues invasives. Seul, il ne suffira pas, parfois il peut même aggraver le problème. Cela dépend beaucoup de l’espèce concernée, consulter un spécialiste permet de décider de la meilleure chose à faire. L’ADREE ou le Conservatoire National de Bailleul peuvent répondre à ce type de question.

La présence ou non de canard et/ou poisson dans la mare est déter

minante pour l’envasement de la mare. Plus ils sont nombreux sur le plan d’eau, plus la mare va s’envaser vite. La raison est simple, leur déjection est très riche en matière organique et leurs mouvements de nage remettent constamment la vase en suspension. Ainsi, l’eau prend une couleur trouble, la lumière passe moins bien et l’activité microbienne en est diminuée. La matière organique s’accumule à vitesse grand V et la mare risque vite d’être comblée. Bien sûr, plus la mare est grande, plus cela va prendre du temps. 

Le curage n’est alors pas l’unique solution, il faut traiter le problème à la base. Le mieux est de diminuer la population. Avec un permis de pêche ou bien en proposant à des pêcheurs de visiter la mare, la population de poisson peut vite réduire. A titre d’exemple, la fédération de pêche conseille environ 10 carpe pour 200 m^2 de surface en eau. Autant dire que pour une petite mare, le mieux est l’absence totale de carpe. Attention, légalement, des poissons de plus de 60 cm ne peuvent pas être déplacés d’un plan d’eau à un autre. Pour les canards, il faut leur donner la possibilité de migrer d’un plan d’eau à un autre. Pour cela, la trame verte et bleue est essentielle dans chaque commune et entre les communes. Elle permet une continuité d’espace vert suffisamment dense pour que les animaux puissent migrer. Si les canards ne migrent pas d’eux même,  ils peuvent aussi être déplacés sur un autre plan d’eau plus grand, comme un lac ou un grand étang.